A Rurre, un tourisme à la Rambo peu respectueux de la nature
Rurrenabaque, Rurre comme tout le monde dit ici, c’est quatre rues, quelques milliers de moustiques, 10 000 habitants et surtout des agences de tourisme qui se multiplient comme des petits pains. La jungle, la pampa et ses animaux attirent en effet chaque année de plus en plus de touristes en quête d’aventure amazonienne. Et les promesses des agences sont nombreuses : observation de caïmans et d’alligators, d’anacondas, de singes, d’oiseaux, baignade avec des dauphins roses et, l’une des activités les plus mises en avant par les tour-opérateurs, la pêche aux piranhas.
Oui mais voilà : la pêche de ces petites bestioles aux dents longues est interdite. Ce qui n’a l’air de chagriner personne ici. Certaines agences, comme de nombreux restos de Rurre, proposent même un filet de piranha pour le diner. Dans l’illégalité la plus complète, bien sûr. "Tout le monde le fait, pourquoi pas nous"?, se justifie Luis, un guide de l’agence Indigena Tours. Et de poursuivre : "Cette loi est stupide. Pourquoi protéger les piranhas ? Ils pullulent dans nos rivières !"
A l’office du tourisme comme à la mairie, le sujet est tabou. "Oui la pêche aux piranhas est interdite, oui tout le monde la pratique et oui les autorités ferment les yeux, me confie tout de même une employée de la mairie sous couvert d’anonymat. Mais ici, à part le tourisme, il n’y a pas beaucoup d’activités. Alors ça arrange tout le monde. Les touristes sont contents et les gens se font un peu d’argent."
Chez Donato Tours, on tient un discours très ferme. "Les agences touristiques de Rurre ont toutes le mot ‘écologie’ dans leur slogan. La vérité, c’est que personne ne se préoccupe de la nature. Et il n’y a pas que le problème de la pêche. Pour satisfaire les touristes, on nourrit les animaux, ce qui est aussi totalement interdit puisque la zone est un parc protégé. Mais donner des bananes à un groupe de singes, c’est l’assurance qu’il y aura du spectacle et que les touristes seront satisfaits", explique amèrement l’un des employés.
Autre épine écologique : les ecolodges, ces campements au bord de la rivière qui accueillent les touristes pour la nuit. Générateurs qui tournent à bloc, toilettes dans la nature… Pas vraiment écolo tout ça. Tourisme à la Rambo contre tourisme responsable : il semble bien que pour l’instant le premier a eu raison de l’Amazonie bolivienne.
NB : Deux agences qui certes sont un peu plus chers mais qui se démarquent du lot et qui pratiquent un vrai écotourisme :
Donato Tours (tel.: 892-25-71)
Madidi Travel (tel.: 892-21-53)
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